Les index glycémiques : Ã se mettre dans la bouche… pas dans l’oeil !
– Une histoire récente
Au cours de la guerre de 1870, Appolinaire Bouchardat, un des premiers diabétologues de l’histoire, avait déja établi un régime capable de guérir les diabétiques. Les Parisiens, enfermés presque sans nourriture à l’intérieur de leur ville, amélioraient considérablement leur diabéte tout en maigrissant. Or, à bien examiner les recommandations de notre précurseur, on s’apercoit qu’il s’agit non seulement d’un régime restrictif en calories mais surtout d’une alimentation ne contenant que des sucres (ou glucides) peu susceptibles de provoquer des montées glycémiques brutales et prolongées.
Il apparaît donc essentiel de pouvoir identifier les différents types de glucides alimentaires en fonction de leur « pouvoir sucrant » et des implications possibles qu’ils peuvent avoir sur la santé.
En 1913 Jacobsen avait montré que, chez un sujet sain, un repas fait de pain et de pommes de terre, donc riche en amidon, provoquait une montée glycémique identique à celle d’un repas composé de sucres simples (saccharose).
Les travaux les plus importants furent effectués par le britannique Jenkins, d’Oxford en 1981 qui inventa la notion d’index glycémique qui devait remplacer progressivement la notion de glucides d’absorption lente (sucres « qui rampent ») et d’absorption rapide (sucres « qui courent »).
Comment les calculer ?
Le pouvoir sucrant est mesuré habituellement sur le chiffre de la glycémie, constatée aprés l’absorption d’un sucre pur ou contenu dans un aliment.
L’index glycémique est basé sur le calcul de « l’aire sous courbe » (ASC). L’ASC totale est une surface mesurée à partir des chiffres de la glycémie au temps 0, 30, 60, 90, 120, 150 et 180 minutes. L’index glycémique est le rapport, exprimé en pourcentage, entre l’ASC de l’aliment étudié et l’ASC de l’aliment de référence (1).
Ayant constaté que la solution de glucose, choisie au départ comme référence, posait des problémes de reproductibilité du fait de son osmolarité trop élevée, Jenkins préféra utiliser le pain blanc, malgré sa variabilité dans les préparations (2).
Lorsque le pain blanc est choisi comme référence, l’index glycémique d’une solution de glucose varie entre 122 et 158. Ce choix peut étre source de confusion car le pain de mie blanc de Jenkins n’est pas celui d’autres équipes. Cependant de nombreuses études permettent de comparer les aliments par rapport au glucose et au pain blanc.
Une vaste famille de glucides et des pouvoirs sucrants différents
Les sucres « simples » sont constitués d’une seule molécule, tels le fructose ou le glucose contenus dans les fruits et légumes, ou le galactose des laitages. Ils traversent la barriére intestinale sans étre soumis à une digestion enzymatique.
– Le fructose est absorbé plus lentement que le glucose et disparaît deux fois plus vite de la circulation. Il est métabolisé dans le foie par la fructokinase et trés peu par l’intestin et le muscle. Il provoque, Ã quantités équivalentes, une montée glycémique et une réponse insulinique moindres que celles du glucose. Ces paramétres doivent étre pris en compte dans l’alimentation des diabétiques et des sportifs.
– Le glucose est absorbé rapidement et totalement dans l’intestin. Ce transport, conditionné par les concentrations de glucose de part et d’autre de la membrane, est sous la dépendance de transporteurs membranaires du glucose (GLUT) dont on connaît au moins 5 types. Ces transporteurs sont considérablement activés par l’insuline. Les tissus qui utilisent le glucose sont trés ubiquitaires et en dehors du foie, le muscle, l’intestin et surtout le cerveau, sont de trés gros consommateurs.
Mais, les sucres « simples » peuvent aussi être constitués de deux molécules, comme le saccharose (sucre de cuisine), le maltose et le lactose.
Le saccharose, aprés hydrolyse intestinale, libére du glucose et du fructose. Ses effets sur les réponses glycémiques et insuliniques sont celles du glucose tandis que son oxydation se rapproche de celle du fructose.
Le lactose, sucre du lait, est formé d’une molécule de glucose et de galactose. Il n’a pas vraiment d’index glycémique notable à prendre en compte dans l’alimentation de l’adulte.
Les index glycémiques sont plus élevés pour les sucres simples que les sucres complexes. Entre eux, les sucres simples ont des index trés différents : le moins élevé est le sucre de cuisine (le saccharose).
Amidons : une digestibilité lente
Les autres glucides alimentaires sont dits « complexes » parce qu’ils comportent plusieurs molécules comme les amidons ou matiéres amylacées, contenues surtout dans les céréales et tubercules. Ils libérent du glucose et du galactose.
Les amidons sont des polyméres des sucres simples. Il en existe deux qui se distinguent par leur structure : linéaire pour l’amylose, ramifiée pour l’amylopectine.
Les index glycémiques (référence glucose) sont les suivants :
– Pommes de terre : 70 Ã 90 %
– Riz blanc : 50 Ã 60 %
– Pâtes : 50 Ã 60 %
– Légumes secs : 20 Ã 40 %
En pratique : quels repas pour quel pouvoir sucrant ?
Il ne suffit pas de calculer les index glycémiques des glucides pour composer un repas car la mixité du repas (glucides + lipides + protéines ) influe considérablement sur le pouvoir hyperglycémiant final.
La présence de protéines dans un repas (30 Ã 50 g. de protéines ) (4) diminue la réponse glycémique.
Les lipides diminuent le pouvoir sucrant des glucides. Certaines confiseries réputées trés hyperglycémiantes comme les biscuits ou les barres chocolatées ont, pour cette raison, un index glycémique nettement inférieur à celui du glucose. En revanche les pommes de terre chips ont un index glycémique supérieur car, malgré la présence de graisse, les amidons sont gélifiés et trés assimilables.
Les fibres alimentaires solubles ou insolubles ont un effet ralentisseur notable sur l’absorption des glucides. Elles diminuent l’effet hyperglycémiant d’un repas.
Il est cependant possible d’évaluer assez exactement le pouvoir hyperglycémiant d’un repas, chez des diabétiques en tenant compte de chacun des index glycémiques (5) et même, en comparant des repas de composition et de tradition différente (indien, italien, chinois, américain et libanais) (6).
De la pathologie à la prévention ?
La question de savoir si, Ã long terme, la constitution différente des sucres alimentaires entraéne des conséquences sur la santé, est loin d’être résolue pour des sujets sains. Pour un diabétique, il est préférable d’absorber des sucres d’index glycémique réduit car cela favorise l’équilibre glycémique en diminuant l’ascension glycémique post-prandiale. Peut-on en pratique orienter le choix des consommateurs vers tel ou tel type d’alimentation ? Si oui, dans quelles situations ?
Fruits et légumes frais et secs : bons pour les diabétiques
En substituant aux pommes de terre et au pain, une alimentation à base de riz et de pâtes, on observe une amélioration significative de l’équilibre glycémique, du taux des phospholipides et des triglycérides. Le remplacement de 50 % des hydrates de carbone à fort index glycémique, par des aliments à faible index glycémique, réduit l’hémoglobine glyquée de 9 %, la fructosamine de 8 %, le cholestérol de 6 % et les triglycérides de 9 %.
Chez les européens du nord, de l’est et de l’ouest, les index glycémiques sont plus élevés en rapport avec une consommation plus importante de pain et de pommes de terre. Chez les européens du sud, l’index glycémique est plus bas en relation avec une consommation plus importante de pâtes et de fruits et légumes (7).
Les montées glycémiques post-prandiales sont en rapport avec l’ingestion de pain blanc, de farines raffinées, de féculents contenant des amidons rapidement assimilables. Les pains « noirs », les légumes secs, les fruits frais et les légumes verts sont des aliments particuliérement adaptés au régime des diabétiques.
Cholestérol et obésité : un rôle à jouer !
Chez des sujets atteints d’hypercholestérolémie, non diabétiques, Jenkins a montré que le choix d’un régime alimentaire, dont l’index glycémique était inférieur de 13 % Ã l’index glycémique moyen, entraînait une baisse significative de la cholestérolémie totale, du LDL cholestérol et des triglycérides.
Actuellement, l’obésité est un des problémes de santé les plus importants dans les sociétés développées. Aux USA, 1 enfant sur 4 est obese et 1 adulte sur 2 a un surpoids. La prévalence de l’affection a doublé depuis 1960. Malgré la réduction de l’apport de graisses, recommandée par le gouvernement Fédéral, atteignant maintenant l’apport de 30 % des calories, la prévalence de l’obésité continue de croître de sorte que le gouvernement américain recommande de diminuer la consommation totale des graisses et des sucres. L’utilisation des index glycémiques devrait permettre d’utiliser dans ce sens un outil intéressant (8).
Des recommandations simples
Toutes les études, de plus en plus nombreuses, indiquent de conseiller une orientation générale de l’alimentation vers des aliments à index glycémique plus bas que ceux utilisés habituellement. L’index glycémique est toutefois assez difficile à appliquer de facon « pointue » lors de la prescription d’un régime. Un certain nombre de recommandations simples peuvent toutefois être déduites de cet outil diététique.
Il est ainsi conseillé d’utiliser des céréales à farine « rustique » et le pain complet plutot que le pain blanc. Pour les féculents : les pâtes et le riz plutôt que les pommes de terre instantanées. Pour les légumes : plutôt les légumes secs mais surtout les légumes verts et les fruits (surtout fruits rouges, pommes et poires).
Il est clair que le probléme n’est pas de jeter l’interdit sur les autres nourritures mais la notion d’index glycémique est cependant trés utile dés lors qu’on désire soigner un diabete, une hypercholestérolémie ou surpoids.
(source aprifel)
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